Poèmes à vous Baptiste Bordet
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- Arts
« Écr.l'inf. » signé parfois Voltaire, abréviation de « Écrasons l'infâme »
Et si de poésie
Ensemble
Nous écrasions l’infâme
N’en serait-il pas plus beau ?
Voguons sur sa carcasse et découvrons l’harmonie , la sensibilité, l’émotion, l’intimité des plus grands poètes…et de nous-même ?
J’aime la poésie. J’aime lire à voix haute. Alors voici ce podcast poétique, pour vous.
Qu'ils vous enchantent
Podcast orchestré par Baptiste Bordet
Instagram : @bordetbaptiste
Mail : baptiste.bordet@hotmail.fr
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Son odeur après la pluie - Cédric Sapin-Defour
"Son odeur après la pluie" est avant tout un titre et une couverture qui ne m'ont pas laissé indifférent
Je mets au défi celui qui n'a pas grandi (dans tous les sens du terme) avec un chien de ne pas s'arrêter dans une librairie devant cet objet littéraire
Et puis vient l'ouverture, ses pages qui défilent comme des souvenirs où l'on aime se replonger
Ses mouvements
Cette candeur
Cette bienveillance
Ses odeurs
Cette intelligence
Cette joie
Son amour
Ses leçons
Qui nous font découvrir Ubak à travers la belle vie de chien qu'il a eue…et remémorer tout ceux que nous avons connus
Et puis vient la sincérité de cet homme @cedricsapindefour, que je remercie chaleureusement de m'avoir donné l'aval pour cette lecture
Tout comme je le remercie de nous avoir offert, sans filtre, ses souvenirs d'amitiés, de doutes, de joies, de peines, de peurs… d'amour
Pour mieux nous replonger dans les nôtres
À tous les chiens qui partagent nos/vos vies
MERCI
Crocus et Gala, je vous aimerai toujours de tout mon cœur. Vous me manquez.
Mail : baptiste.bordet@hotmail.fr
Instagram : @bordetbaptiste -
Guillaume Apollinaire - XXXVII - Poèmes à Lou
Mon cœur j’ai regardé longtemps ce soir Devant l’écluse L’étoile ô Lou qui fait mon désespoir Mais qui m’amuse
Ô ma tristesse et mon ardeur Lou mon amour Les jours s’écoulent Les nuits s’en vont comme s’en va le jour Les nuits déroulent
Le chapelet sacrilège des obus boches C’est le printemps Et les oiseaux partout donnent leurs bamboches On est content
On est content au bord de la rivière Dans la forêt On est content La mort règne sur terre Mais l’on est prêt
On est prêt à mourir pour que tu vives Dans le bonheur Les obus ont brûlé les fleurs lascives Et cette fleur
Qui poussait dans mon cœur et que l’on nomme Le souvenir Il reste bien de la fleur son fantôme C’est le désir
Il ne vient que la nuit quand je sommeille Vienne le jour Et la forêt d’or s’ensoleille Comme l’Amour
Les nuages s’en vont courir les mondes Quand irons-nous Courir aussi tous deux les grèves blondes Puis à genoux
Prier devant la vaste mer qui tremble Quand l’oranger Mûrit le fruit doré qui te ressemble Et sans bouger
Écouter dans la nuit l’onde cruelle Chanter la mort Des matelots noyés en ribambelle Ô Lou tout dort
J’écris tout seul à la lueur tremblante D’un feu de bois De temps en temps un obus se lamente Et quelquefois
C’est le galop d’un cavalier qui passe Sur le chemin Parfois le cri sinistre de l’agace Monte Ma main
Dans la nuit trace avec peine ces lignes Adieu mon cœur Je trace aussi mystiquement les signes Du Grand Bonheur
Ô mon amour mystique ô Lou la vie Nous donnera La delectation inassouvie On connaitra
Un amour qui sera l’amour unique Adieu mon cœur Je vois briller cette étoile mystique Dont la couleur
Est de tes yeux la couleur ambigüe J’ai ton regard Et j’en ressens une blessure aigüe Adieu c’est tard
Courmelois, le 15 avril 1915
Tableau : Le rêve de Édouard Detaille
Musique : Nocturne No.15 in F Minor, Op. 55 No.1
Mail : baptiste.bordet@hotmail.fr
Instagram : @bordetbaptiste -
Mercredi 1er juin 1949 - Albert Camus à Maria Casarès - Correspondance
Pour cette épisode j’ai le plaisir de vous lire une lettre de Albert Camus destiné à Maria Casarès, écrite le Mercredi 1er juin 1949
De 1944 à 1959, ses deux êtres ont partagé une correspondance privé empli de douceur, de sincérité, de doute, de joies, de peine, de confiance et de bienveillance…tout ce qui fait une grande histoire d’amour ?
Je vous souhaite de découvrir ses lettres, leurs mots sont de beaux refuges, leur amour porteur d’espoir
Belle écoute
« Le soir tombe, mon amour, et ce jour qui finit est le dernier ou je puisse encore respirer le même air que toi.
Cette semaine a été affreuse et je pensais que je n’en
sortirais pas.
Maintenant, le départ est là. Et je me dis que je préfère encore la souffrance solitaire et la liberté de pleurer, si l’envie m’en prend. Je me dis aussi qu’il est temps de prendre ce qui vient avec la force qui en viendra à bout. Ce qui rend tout difficile c’est ton silence et les paniques qu’il m’apporte. Je n’ai jamais
pu supporter tes silences que ce soit celui-ci ou ces
autres, avec ton front buté, et ton visage verrouillé, toute l’hostilité du monde rassemblée entre tes sourcils.
Et aujourd’hui encore je t’imagine hostile, ou étrangère, ou détournée, ou niant obstinément cette vague qui m’emplit.
Du moins je veux oublier cela pour quelques minutes et te parler encore avant de me taire pour de longs jours.
Je remets tout entre tes mains. Je sais que pendant ces longues semaines il y aura des hauts et des bas.
Sur les sommets, la vie emporte tout, dans les creux, la souffrance aveugle.
Ce que je te demande c’est que vivante ou repliée, tu préserves l’avenir de notre amour.
Ce que je souhaite, plus que la vie elle-même, c’est de te retrouver avec ton visage heureux, confiante, et décidée à vaincre avec moi.
Quand tu recevras cette lettre, je serai déjà en mer.
La seule chose qui me permettra de supporter cette séparation, et cette séparation dans la souffrance, c’est la confiance que j’ai désormais en toi. Chaque fois que je n’en pourrais plus, je m’abandonnerai à toi – sans une hésitation, sans une question.
Pour le reste, je vivrais comme je le pourrai.
Attends-moi comme je t’attends. Ne te replie que si tu ne peux faire autrement. Vis, sois éclatante et curieuse, recherche ce qui est beau, lis ce que tu aimes et quand la pause viendra, tourne-toi vers moi qui serai toujours tourné vers toi.
Je sais maintenant sur toi et sur moi beaucoup plus que je ne savais. C’est pourquoi je sais que te perdre c’est mourir d’une certaine manière.
Je ne veux pas mourir et il faut aussi que tu sois heureuse sans être diminuée. Si dur, si terrible que soit le chemin qui nous attend, il faudra le prendre.
Au revoir, mon amour, mon enfant chéri, au revoir, dure et douce, si douce quand tu le veux…Je t’aime sans regrets et sans réserves, d’un grand élan tout clair qui m’emplit tout entier. Je t’aime comme je me sens vivre, parfois, sur les sommets du monde, et je t’attends avec une obstination longue comme dix vies, une tendresse qui ne s’épuisera pas, le grand et lumineux désir que j’ai de toi, la soif terrible que j’ai de ton cœur. Je t’embrasse, je te serre contre moi.
Au revoir, encore, ton absence m’est cruelle, mais tous les bonheurs du monde ne valent pas une souffrance avec toi.
Quand j’aurai de nouveau tes mains sur mes épaules, je serai, en une seule fois, payé de tout.
Je t’aime, j’attends, non plus victoire, mais espérance.
Ah ! qu’il est difficile de te quitter, ton cher visage va s’enfoncer encore dans la nuit, mais je te retrouverai sur cet océan que tu aimes, à l’heure du soir quand le ciel a la couleur de tes yeux.
Au revoir, j’ai le cœur plein de larmes, mais je sais que dans deux mois, la vraie vie commencera – que j’embrasse déjà sur ta bouche. »
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Le génie de la foule - Charles Bukowski
Il y a assez de traîtrise, de haine, de violence, D’absurdité dans l’être humain moyen Pour approvisionner à tout moment n’importe quelle armée Et les plus doués pour le meurtre sont ceux qui prêchent contre Et les plus doués pour la haine sont ceux qui prêchent l’amour Et les plus doués pour la guerre – finalement – sont ceux qui prêchent la paix
Méfiez-vous De l’homme moyen De la femme moyenne Méfiez-vous de leur amour
Leur amour est moyen, recherche la médiocrité Mais il y a du génie dans leur haine Il y a assez de génie dans leur haine pour vous tuer, pour tuer n’importe qui
Ne voulant pas de la solitude Ne comprenant pas la solitude Ils essaient de détruire Tout Ce qui diffère D’eux
Etant incapables De créer de l’art Ils ne comprennent pas l’art
Ils ne voient dans leur échec En tant que créateurs Qu’un échec Du monde
Etant incapables d’aimer pleinement Ils croient votre amour Incomplet Du coup, ils vous détestent
Et leur haine est parfaite Comme un diamant qui brille Comme un couteau Comme une montagne Comme un tigre Comme la ciguë Leur plus grand art
Musique : Pink Floyd - Breathe - The Dark Side of the Moon
Tableau : Edvard Munch - Le Cri -
Mars - Baptiste Bordet
Très heureux de vous présenter cet épisode où je lis un de mes poèmes « Mars » sur la chanson Space Oddity de David Bowie interprété par Grazzia Giu, ma maman
L’occasion pour moi de vous informer que mon recueil de poème « Et ton absence leur donne » est toujours disponible chez mon ami et éditeur la « Galerie Tracanelli » à Grenoble, à la librairie « À tout lire » dans le XXe arrondissement de Paris, ou bien près de moi, et pour cela vous pouvez me contacter sur Instagram ou ma boîte mail (voir en description du podcast)
Le titre Space Oddity de David Bowie repris par ma maman est disponible sur son merveilleux album « Life is » chez tous les bons disquaire et différentes plateformes
Belle écoute
La dernière fois sur YouTube
J’ai pu visiter Mars en 360 degrés
Et ouais
Ça m’a fait rire
J’ai trouvé cela absurde
Incroyable
Dingue
Mais rapidement
J’ai déchanté
Moi tout ce que je veux
C’est voir tes yeux
Qui me regardent
Mars je m’en fous
Mars j’en veux pas
Moi je veux toi
En vrai
Photo : L’homme qui venait d’ailleurs - David Bowie
Musique : Space Oddity reprise par Grazzia Giu -
contempler les couilles du chat - Charles Bukowski
assis là près de la fenêtre
transpirant des gouttes de bière
malmené par l’été
je contemple les couilles du chat.
ce n’est pas mon choix.
il roupille dans un vieux fauteuil à bascule
sur le porche
et le voilà qui me jette un regard -
par-dessus -
accroché à ses couilles de chat.
il y a sa queue, cette maudite chose,
toujours à traîner dans les pattes -
j’observe ses petites noix recouvertes de fourrure-
qu’est-ce qui peut bien traverser l’esprit d’un homme
regardant les couilles d’un chat ?
certainement pas les navires engloutis des grandes batailles navales,
certainement pas un programme d’aide aux pauvres.
certainement pas un marché aux fleurs ou une douzaine
d’œufs.
certainement pas un interrupteur cassé
des couilles restent des couilles, voilà tout-
plus encore les couilles d’un chat,
les miennes ont l’air assez pâteuses
et sont, si j’en crois mes contemporains,
relativement massives :
“t’as une sacrée paire de couilles, Bukowski !”
mais les couilles du chat :
je saurais pas dire s’il est accroché à elles ou si c’est elles qui sont accrochées à lui -
vous voyez, tous les soirs ou presque il y a cette bagarre
pour obtenir les faveurs d’une femelle -
et c’est facile ni pour lui ni pour moi.
vous voyez, là
il lui manque un bout de l’oreille gauche;
un jour j’ai cru qu’on lui avait arraché un œil
mais quand la croûte de sang séché est tombée
une semaine plus tard
il y avait cet œil pur
couleur vert et or
qui me regardait.
son corps entier est perclus de cicatrices
et l’autre jour,
je voulais lui caresser la tête
il a poussé un hurlement et m’a presque mordu
sous la fourrure, fendue en deux,
on pouvait voir son crâne
ça n’est ni facile ni pour lui ni pour moi.
ces couilles de chat, pauvre vieux.
le voilà maintenant qui rêve -
de quoi ? - un gros merle dans sa gueule ?
une ribambelle de chattes en chaleur ? -
ses rêves sont ceux qu’ils accomplit éveillé
il verra bien s’ils se réalisent
ce soir.
bonne chance, mon vieux,
ça n’est jamais facile,
accrochés à nos couilles, voilà c’est ça,
on est accrochés à nos couilles,
et je ferais bien moi-même de les utiliser un peu
-
en attendant -
ouvre l’œil, surveille ta garde
et déguerpis
dès lors qu’il n’y a plus rien à
en tirer