
12 épisodes

Les Fables de La Fontaine Comédie-Française
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4,9 • 17 notes
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Intégrale des Fables de La Fontaine, lues par la troupe de la Comédie-Française. Collection dirigée par Christian Gonon.
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Suliane Brahim dit Le Renard et l'Écureuil
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Il ne se faut jamais moquer des misérables,
Car qui peut s'assurer d'être toujours heureux ?
Le sage Ésope dans ses fables
Nous en donne un exemple ou deux ;
Je ne les cite point, et certaine chronique
M'en fournit un plus authentique.
Le Renard se moquait un jour de l'Écureuil
Qu'il voyait assailli d'une forte tempête :
Te voilà, disait-il, près d'entrer au cercueil
Et de ta queue en vain tu te couvres la tête.
Plus tu t'es approché du faîte,
Plus l'orage te trouve en butte à tous ses coups.
Tu cherchais les lieux hauts et voisins de la foudre :
Voilà ce qui t'en prend ; moi qui cherche des trous,
Je ris, en attendant que tu sois mis en poudre.
Tandis qu'ainsi le Renard se gabait,
Il prenait maint pauvre poulet
Au gobet ;
Lorsque l'ire du Ciel à l'Écureuil pardonne :
Il n'éclaire plus, ni ne tonne ;
L'orage cesse ; et le beau temps venu
Un chasseur ayant aperçu
Le train de ce Renard autour de sa tanière :
" Tu paieras, dit-il, mes poulets. "
Aussitôt nombre de bassets
Vous fait déloger le compère.
L'Écureuil l'aperçoit qui fuit
Devant la meute qui le suit.
Ce plaisir ne lui dure guère,
Car bientôt il le voit aux portes du trépas.
Il le voit ; mais il n'en rit pas,
Instruit par sa propre misère. -
Noam Morgensztern dit La Cigale et la Fourmi
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La cigale ayant chanté
Tout l'été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue.
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la Fourmi sa voisine,
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu'à la saison nouvelle.
Je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l’août, foi d'animal,
Intérêt et principal.
La Fourmi n'est pas prêteuse,
C'est là son moindre défaut.
Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
Nuit et jour à tout venant,
Je chantais, ne vous déplaise.
Vous chantiez ? j'en suis fort aise,
Eh bien! dansez maintenant. -
Danièle Lebrun dit Le Coq et le Renard
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Sur la branche d’un arbre était en sentinelle
Un vieux Coq adroit et matois.
Frère, dit un Renard adoucissant sa voix,
Nous ne sommes plus en querelle :
Paix générale à cette fois.
Je viens te l’annoncer ; descends que je t’embrasse.
Ne me retarde point de grâce :
Je dois faire aujourd’hui vingt postes sans manquer.
Les tiens et toi pouvez vaquer
Sans nulle crainte à vos affaires ;
Nous vous y servirons en frères.
Faites-en les feux dès ce soir.
Et cependant viens recevoir
Le baiser d’amour fraternelle.
Ami, reprit le Coq, je ne pouvais jamais
Apprendre une plus douce et meilleure nouvelle,
Que celle
De cette paix.
Et ce m’est une double joie
De la tenir de toi. Je vois deux Lévriers,
Qui, je m’assure, sont courriers,
Que pour ce sujet on envoie.
Ils vont vite, et seront dans un moment à nous.
Je descends ; nous pourrons nous entrebaiser tous.
Adieu, dit le Renard, ma traite est longue à faire.
Nous nous réjouirons du succès de l’affaire
Une autre fois. Le galant aussitôt
Tire ses grègues, gagne au haut,
Mal-content de son stratagème ;
Et notre vieux Coq en soi-même
Se mit à rire de sa peur :
Car c’est double plaisir de tromper le trompeur. -
Anne Kessler dit La Mort et le Malheureux, suivi de La Mort et le Bûcheron
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Un Malheureux appelait tous les jours
La mort à son secours.
O mort, lui disait-il, que tu me sembles belle !
Viens vite, viens finir ma fortune cruelle.
La Mort crut, en venant, l'obliger en effet.
Elle frappe à sa porte, elle entre, elle se montre.
Que vois-je! cria-t-il, ôtez-moi cet objet ;
Qu'il est hideux ! que sa rencontre
Me cause d'horreur et d'effroi !
N'approche pas, ô mort ; ô mort, retire-toi.
Mécénas fut un galant homme :
Il a dit quelque part : Qu'on me rende impotent,
Cul-de-jatte, goutteux, manchot, pourvu qu'en somme
Je vive, c'est assez, je suis plus que content.
Ne viens jamais, ô mort ; on t'en dit tout autant.
La Mort et le Bucheron
Un pauvre Bûcheron tout couvert de ramée,
Sous le faix du fagot aussi bien que des ans
Gémissant et courbé marchait à pas pesants,
Et tâchait de gagner sa chaumine enfumée.
Enfin, n'en pouvant plus d'effort et de douleur,
Il met bas son fagot, il songe à son malheur.
Quel plaisir a-t-il eu depuis qu'il est au monde ?
En est-il un plus pauvre en la machine ronde ?
Point de pain quelquefois, et jamais de repos.
Sa femme, ses enfants, les soldats, les impôts,
Le créancier, et la corvée
Lui font d'un malheureux la peinture achevée.
Il appelle la mort, elle vient sans tarder,
Lui demande ce qu'il faut faire
C'est, dit-il, afin de m'aider
A recharger ce bois ; tu ne tarderas guère.
Le trépas vient tout guérir ;
Mais ne bougeons d'où nous sommes.
Plutôt souffrir que mourir,
C'est la devise des hommes. -
Christian Gonon dit À monseigneur le Dauphin
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Je chante les Héros dont Esope est le Père,
Troupe de qui l'Histoire, encor que mensongère,
Contient des vérités qui servent de leçons.
Tout parle en mon Ouvrage, et même les Poissons :
Ce qu'ils disent s'adresse à tous tant que nous sommes.
Je me sers d'Animaux pour instruire les Hommes.
Illustre rejeton d'un Prince aimé des cieux,
Sur qui le monde entier a maintenant les yeux,
Et qui, faisant fléchir les plus superbes Têtes,
Comptera désormais ses jours par ses conquêtes,
Quelque autre te dira d'une plus forte voix
Les faits de tes Aïeux et les vertus des Rois.
Je vais t'entretenir de moindres Aventures,
Te tracer en ces vers de légères peintures.
Et, si de t'agréer je n'emporte le prix,
J'aurai du moins l'honneur de l'avoir entrepris. -
Rebecca Marder dit L'Oiseau blessé d'une flèche
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Mortellement atteint d’une flèche empennée,
Un Oiseau déplorait sa triste destinée.
Et disait en souffrant un surcroît de douleur,
Faut-il contribuer à son propre malheur ?
Cruels humains, vous tirez de nos ailes
De quoi faire voler ces machines mortelles ;
Mais ne vous moquez point, engeance sans pitié :
Souvent il vous arrive un sort comme le nôtre.
Des enfants de Japet toujours une moitié
Fournira des armes à l’autre.