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4,5 • 8 notes
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Ballast est une revue, créée en novembre 2014, d’une quarantaine de militants/bénévoles (de France et de Belgique), indépendante de tout groupe de presse et parti politique. Sans publicité, elle est disponible en librairie ; le site est quant à lui alimenté chaque semaine en articles et entretiens inédits et autonomes.
Ce podcast propose des lectures d'articles du site ou de la revue papier.
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Gabriel, gilet jaune mutilé : « Je n’avais jamais foutu les pieds dans une manifestation » — Sophie Divry
Samedi 24 novembre 2018, acte II.
Les invisibles arborent désormais un gilet jaune ; ils sont venus du pays tout entier pour exiger une vie meilleure. On appelle à la démission du « président des riches », on élève des barricades. « C’est le peuple en colère », nous dit-on aussitôt. Et c’est déjà l’émeute sur les Champs-Élysées — peut-être l’insurrection. L’un des membres de notre rédaction se dirige en direction de l’avenue Franklin‑D.-Roosevelt. Des tirs, des gaz, des cris. Il entend : « Un blessé ! Appelez les pompiers ! » Il s’approche. « Il y a du sang partout. Un gamin en état de choc », écrira-t-il quelques jours plus tard dans nos colonnes.
Il a 21 ans, il s’appelle Gabriel, il vient de la Sarthe, il est monté sur la capitale pour exprimer son « ras-le-bol de voir les gens dans la misère », il s’apprêtait à passer son BTS en chaudronnerie. C’est la première fois qu’il participe à une manifestation et les forces armées du régime fraîchement élu « pour faire barrage à l’extrême droite » viennent de lui arracher une partie de la main — 26 grammes de TNT, catégorie « arme de guerre ». La guerre contre « ceux qui ne sont rien ». Sa mère se tient à ses côtés. « Mon regard croise celui de son fils. Il lève sa main en l’air afin d’éviter une hémorragie. »
Nous sommes restés en contact avec la famille Pontonnier. Cette semaine de publications lui sera consacrée : deux ans ont passé — deux ans d’une lutte quotidienne : sanitaire, juridique, financière, psychologique. Laissons la parole à l’écrivaine Sophie Divry, qui ouvre cette série de textes : « J’ai rencontré, environ un an après leur accident, les cinq gilets jaunes qui avaient eu la main arrachée par une grenade. À partir de ces cinq entretiens, et avec leur accord, j’ai monté un texte choral publié en octobre 2020 au Seuil sous le titre Cinq mains coupées. Exceptionnellement, pour Ballast, avec l’autorisation de Gabriel et de sa famille, je livre ici l’entièreté de l’interview réalisée en janvier 2020, au Mans, lorsque je l’ai vu avec sa mère. L’entretien a duré trois heures. Ce sont des mots difficiles, un parcours brisé, qu’il importe que chacun considère à leur juste place. Nous savons que l’État protège les riches et écrase les ouvriers. Les mots de Gabriel permettent de réaliser ce que cela veut dire vraiment. »
https://www.revue-ballast.fr/gabriel-gilet-jaune-mutile-je-navais-jamais-foutu-les-pieds-dans-une-manifestation/
Texte de Sophie Divry, lu par Maya Mihindou, Anouchka Wood et Cyrille Choupas.
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« Nous étions des mains invisibles »
Nous l’avions rencontrée une première fois au mois de mars 2018, lors d’une manifestation en soutien aux cheminots, aux côtés des employés d’une entreprise de nettoyage — H. Reiner Onet — en charge des gares d’Île-de-France. « Nous sommes aussi là pour défendre nos droits : depuis la fin de la grève, Onet n’a pas respecté le protocole », nous avait dit une de ses collègues. Fernande Bagou, la cinquantaine, a justement été l’une des porte-paroles de cette grève menée tambour battant, fin 2017, durant 45 jours : le nouvel employeur entendait déplacer les salariés d’un chantier à l’autre selon son bon vouloir — une « clause de mobilité » refusée par l’ensemble du personnel. Cette grève, appelant en outre au maintien de tous les postes et à l’égalisation des paniers repas, était une première pour la plupart. D’une voix calme, l’agente de nettoyage revient sur son expérience de travail au quotidien et cette bataille remportée : « L’employeur doit savoir que les salariés ne sont pas des robots, pas des esclaves. » Et met en garde la direction, si celle-ci en venait à fouler aux pieds ses engagements.
https://www.revue-ballast.fr/nous-etions-des-mains-invisibles/
Témoignage de Fernande Bagou, lu par Maya Mihindou, Anouchka Wood et Cyrille Choupas.
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Joëlle, ouvrière viticole et assistante maternelle — Rémi Larue
Sud-Ouest, département de la Gironde. Joëlle, bientôt 60 ans quand nous la rencontrons, est fille d’ouvriers agricoles. Après treize années à exercer comme retoucheuse dans le domaine textile, elle a gagné sa vie en tant qu’ouvrière viticole et assistante maternelle. Titulaire du statut de travailleuse handicapée et actuellement au chômage, elle rêve de pouvoir partir à la retraite et profiter, enfin, de ses enfants et petits-enfants. Un récit sur fond de chanson française.
https://www.revue-ballast.fr/joelle-ouvriere-viticole-et-assistante-maternelle/
Texte de Rémi Larue, lu par Mélanie Simon-Franza, Maya Mihindou et Cyrille Choupas.
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La Nouvelle Métisse : paroles de Gloria Anzaldúa — Maya Mihindou
L’autrice et poétesse Gloria Anzaldúa, figure du féminisme chicana, est née en 1942 sur la ligne de démarcation entre le Mexique et les États-Unis. Habiter la frontière — et donc les conflits sociaux, linguistiques et narratifs qui s’y logent : elle n’a jamais cessé de travailler cette idée. Son ouvrage Borderlands/la Frontera : the New Mestiza, paru en 1987, a fait date : pour ce qu’il disait autant que pour la manière avec laquelle il le disait (croisant ainsi essai, fiction, poésie et récit autobiographique1). Anzaldúa est issue du monde ouvrier texan — celui des travailleuses et des travailleurs agricoles chicanos. Elle y a fait ses premières armes et critiques militantes. C’est forte de cet ancrage qu’elle a investi l’espace universitaire, s’avançant, dès le début des années 1980, comme « queer ». Un décalage perpétuel. Pour Anzaldúa, la frontière est une peau et, dans sa pensée, un outil à même d’aiguiser ce que le sociologue afro-américain W.E.B Du Bois théorisait, dès le début du XXe siècle, sous la notion de « double conscience ». Comment, en somme, traduire depuis le Nord l’expérience des minorités héritières de l’esclavage ou du colonialisme ? Nous lui avons consacré une série de publications à l’été 2020. Nous publions aujourd’hui son portrait.
https://www.revue-ballast.fr/la-nouvelle-metisse-paroles-de-gloria-anzaldua/
Texte de Maya Mihindou, lu par Cyrille Choupas et Maya Mihindou
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Témoignage : fuir Kiev sans la nationalité ukrainienne — Yanna Oiseau
Le politologue palestinien Yousef Munayyer s’étonnait il y a peu, dans les pages de The Nation, des « doubles standards » qui saturent le discours occidental « mainstream » depuis l’invasion de l’Ukraine. Ce qui jusqu’à la veille était impensable — ou, pire, tenu pour condamnable — se voit célébré par l’intégralité du personnel médiatique, politique et culturel. C’est que certains humains sont perçus et pensés « comme moins humains que d’autres ». Les vingt-sept États membres de l’Union européenne ont rapidement activé une procédure de régularisation visant à protéger les personnes fuyant la guerre : créée en 2001, cette protection temporaire n’avait jamais été mise en application. Mais une partie de la population résidant en Ukraine en est actuellement exclue : en clair, ceux et celles qui n’ont pas la nationalité ukrainienne. Rien, pourtant, ne saurait justifier la distinction de civils échappant ensemble au même conflit armé : ni les papiers, ni — lorsque la chose est formulée sans détour — la couleur de peau ou la confession. Nous avons recueilli le témoignage d’Alaya, jeune femme originaire d’Afrique subsaharienne qui vient de fuir Kiev.
https://www.revue-ballast.fr/temoignage-fuir-kiev-sans-la-nationalite-ukrainienne/
Texte de Yanna Oiseau, lu par Mélanie Simon-Franza, Maya Mihindou et Cyrille Choupas.
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Partout la mer est libre — Maya Mihindou
« Une sorte d’engrenage infini rattache le minéral, le végétal et l’animal », écrivait Anita Conti. La première femme océanographe n’a jamais cessé de raconter la mer en suivant les marins et, assistant aux avancées industrielles, d’alerter de la tournure du monde à la vue des océans vidés par l’être humain. Si les forêts sont le « poumon de l’humanité », l’adage est incomplet : les océans renferment du carbone et produisent la plus importante part de l’oxygène que nous respirons. Pourtant, nous sommes sourds aux réalités sous-marines. Dans les océans, deux organismes sont intimement liés pour façonner le gaz que l’on inspire : le plancton et la baleine. Sur le premier, relisons Conti : « Les êtres vivants du plancton sécrètent d’impalpables traces de mucus qui sont les pièges des poussières minérales d’origines célestes, ou simplement continentales et emportées par les vents ; et ces éléments s’enfoncent ; et à chaque seconde, s’enfoncent avec eux les incalculables milliards d’êtres qui meurent. » Pour ce qui est de la baleine, mammifère migrateur habitué à nager sous les centaines de milliers de bateaux qui sillonnent le monde, nous en suivons, ici, la trace.
https://www.revue-ballast.fr/partout-la-mer-est-libre/
Texte de Maya Mihindou, lu par Maya Mihindou et Cyrille Choupas.
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