Le respect de la vie privée
Étienne-Ernest-Hippolyte PERREAU affirmait en 1909 que « notre Code civil, qui réglemente si minutieusement les droits du patrimoine, passe, à peu d’exceptions près, sous silence les droits de la personnalité » (Des droits de la personnalité, RTD civ. 1909. 501). Ce n’est qu’à partir de la seconde moitié du XXe siècle que les droits de la personnalité accèdent à une large reconnaissance et en particulier le respect de la vie privée. Si le corps vivant est la personne, la personne ne se réduit pas à celui-ci. La protection de l’intégrité de la personne, pour se réaliser pleinement, doit saisir la personne au-delà son corps. Ainsi, l’article 9 du Code civil affirme que « chacun a droit au respect de sa vie privée » et l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ». La notion de vie privée ne fait l’objet d’aucune définition légale et la jurisprudence se garde bien d’en fournir une, préférant la caractérisation casuistique. C’est sans doute là le gage d’une plus grande efficacité de la protection des personnes, car l’élasticité conceptuelle de la vie privée permet aux tribunaux de répondre aux formes variées et nouvelles d’agressions que les individus sont amenés à subir dans la société contemporaine. Toujours en construction et en mutation, le droit au respect de la vie privée, et plus généralement les droits de la personnalité, manque d’une conceptualisation générale comparable aux théories présentées pour les droits patrimoniaux. Aussi en l’absence de définition, la délimitation de la vie privée est délicate à appréhender, son assise ne peut donc reposer que sur une casuistique jurisprudentielle favorable à une protection des personnes. Toutefois, les droits de la personnalité et spécifiquement le respect de la vie privée, en tant que droit de contrôle, permettent avec certitude à la personne d’exercer sa maîtrise des différents aspects de sa personnalité. Aussi, la mise en œuvre du droit devient variable en fonction de la volonté du titulaire, de l’ordre public et du droit des tiers. Ainsi, nous recevons Franck Touret, professeur de droit civil et de procédure civile au sein de la Prépa ISP pour revenir sur cette notion fondamentale : le respect de la vie privée.