Tanzanie: les femmes d'Ukerewe abandonnées par leurs maris pêcheurs [3/3]

Reportage Afrique

Les femmes font partie des premières victimes du changement climatique, et l'intensification du réchauffement de la planète vient souvent bouleverser leur vie. C'est le cas de nombreuses d’entre elles sur l’île d'Ukerewe, sur le lac Victoria, au nord de la Tanzanie. À cause de la montée des eaux et de la diminution de la population de poissons dans les eaux du lac, certains maris pêcheurs décident donc d'abandonner définitivement leur famille pour trouver plus de poissons et de revenus ailleurs, laissant femme et enfants dans une extrême précarité.

C'est un groupe de femmes enjouées qui se retrouve sur un lopin de terre asséchée, entouré de quelques arbres, à Murutunguru, au nord de l'île d'Ukerewe. Parmi elles, Sarah Bigambo, 28 ans et mère de six enfants. En 2021, alors qu'elle était enceinte, son mari pêcheur lui a annoncé qu'il partait : « Quand il est parti, il a dit qu'il avait trouvé un travail sur l'île. Il m'a promis d'envoyer de l'argent et il allait et venait. Mais maintenant, il est parti pour de bon. »

Ce qui a causé le départ de son mari, c'est le manque de poissons. Alors qu'il était auparavant possible d'en pêcher 500 kilos par jour, il est désormais souvent difficile d'en ramener cinq. Utilisation de filets aux mailles trop petites et intensification des pluies liée au changement climatique expliquent cette chute brutale. Des faits confirmés par Joyce Komanya, du Centre juridique et des droits de l'homme à Dar es Salam et auteure d'un rapport sur le sujet :

« Depuis que nous avons commencé à documenter et observer le changement de modèle climatique, nous avons réalisé qu'il pourrait s'agir du changement climatique. Les gens ont vécu dans cette zone et pêché depuis très longtemps, mais nous n'avons jamais vu de tels changements comme ceux actuels. »

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« Nous continuons à nous battre pour nos enfants »

Comme souvent, les femmes sont les premières victimes du changement climatique. Comme Habiba, 47 ans, dont le mari pêcheur a, lui aussi, quitté le foyer : « C'est tellement difficile de trouver de la nourriture. La situation est très mauvaise. Les enfants vont à l'école sans rien manger de la journée, ils reviennent sans énergie. Je leur dis de rester forts, mais c'est très dur. Je ne sais pas où est leur père, il est parti sans même dire au revoir. Nous, les femmes, nous ne pouvons pas juste abandonner nos familles. Nous continuons à nous battre pour nos enfants. »

Habiba et Sarah trouvent du soutien auprès du groupe de femmes Sauti Ya wanawake (« La voix des femmes »), une ONG locale. Ensemble, elles fabriquent du savon qu'elles revendent ensuite. Un maigre revenu pour ces femmes d'Ukerewe, dont l'avenir et celui de leurs enfants restent plus qu'incertain.

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