À la Une: la diplomatie paralysée face à la guerre dans l’est de la RDC

Revue de presse Afrique

« Où s'arrêteront le M23 et le Rwanda ? » : question posée par le site d’information guinéen Ledjely. « La facilité avec laquelle les rebelles viennent de prendre le contrôle des deux principales régions du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, en l’espace d’un mois seulement, doit inquiéter les autorités congolaises ».

D’autant que« sur le plan diplomatique, personne ne répond, pointe Ledjely. Personne n’écoute vraiment les doléances de Félix Tshisekedi. À l’ONU, à la Communauté de l’Afrique de l’Est, à la Communauté de développement de l’Afrique australe et à l’Union africaine, on n’ose même pas citer le Rwanda comme agresseur. Seuls le Royaume-Uni et la France, après la chute de Bukavu le week-end dernier, ont eu le courage d’appeler nommément le pays de Kagame à se retirer des zones qu’il a contribué à conquérir. Mais en vain. (…) Dans ces conditions, conclut le site guinéen, il n’y a donc pas de véritable obstacle susceptible d’arrêter le M23, s’il décidait de conquérir Kinshasa ». 

« Condamnations tièdes… »

La communauté internationale reste donc les bras croisés… C’est ce que dénonce avec force dans une tribune publiée par Le Monde Afrique le chercheur américain Jason Stearns, fondateur du Groupe d’étude sur le Congo.

« Trois semaines se sont écoulées depuis la chute de Goma, sans autre réaction que des condamnations tièdes, s’insurge-t-il. Au sein de l’UE, où les décisions de suspension de l’aide nécessitent un consensus, quelques intérêts étroits ont bloqué l’action. Le Rwanda a déployé des troupes dans le nord du Mozambique, où elles ont repoussé les militants islamistes, protégeant ainsi un projet pétrolier de 20 milliards de dollars appartenant à TotalEnergies. Cela a rendu la France réticente à faire pression sur le Rwanda. Depuis le début de la crise en 2021, Élysée a joué un rôle-clé en soutenant la hausse du financement à Kigali, dénonce encore Jason Stearns. Aux États-Unis, poursuit-il, les postes les plus élevés concernant l’Afrique n’ont pas encore été pourvus, ce qui a ralenti l’action. Parmi les pays africains, le manque de leadership, associé à l’efficacité diplomatique de Kigali, a empêché toute mention explicite de la présence du Rwanda en RDC dans les déclarations officielles des organismes régionaux ».

Résultat, soupire Jason Stearns : « quel est le pays étranger le plus populaire aujourd’hui ? La Russie, qui n’a pratiquement aucune présence politique ou économique dans le pays. La crise du M23 est un signe supplémentaire des changements géopolitiques dans le monde. La Chine, les Émirats arabes unis, le Qatar et la Turquie sont en plein essor en Afrique, tandis que les États-Unis, qui semblent désormais déterminés à démanteler la plus grande organisation humanitaire au monde, et l’Europe se replient sur eux-mêmes, en proie au nativisme et au populisme ».

« Dépoussiérer » le pouvoir…

Autre tribune cette fois publiée par le site burkinabé WakatSéra. Elle est signée Jean-Jules Lema Landu, journaliste congolais, réfugié en France. Pour lui, le dialogue reste la clé… Il se félicite de la démarche de paix engagée par les religieux congolais : « les Églises Catholique et Protestante doivent en extraire le meilleur, affirme-t-il, en équilibre dans “la part“ à accorder à toutes les parties. Pour nous, précipiter le départ de Félix Tshisekedi avant la fin de son deuxième mandat, en 2028, n’aurait aucun apport positif, poursuit-il. Bien au contraire. L’essentiel, c’est de dépoussiérer urgemment les rouages gangrénés de la bonne gouvernance, au travers d’une forme de gouvernement de transition et d’union nationale. D’une manière ou d’une autre, avec un Tshisekedi “régnant sans gouverner“. La formule est possible, assure encore Jean-Jules Lema Landu. Cela permettrait d’organiser les prochaines élections dans des conditions apaisées et de transparence. C’est tout ce dont le peuple congolais a besoin ».

… et dialoguer avec le M23 ?

Enfin, à lire également l’éditorial du New Times à Kigali, quotidien proche du pouvoir rwandais, qui estime que Kinshasa doit négocier avec le M23. « L’est de la RDC a besoin de solutions audacieuses et non conventionnelles, écrit le New Times. Le M23 pourrait bien être la pilule amère que Kinshasa doit avaler (…). Pour le bien de millions de personnes, il est temps d’envisager l’impensable. Kinshasa ne devrait pas considérer le M23 comme une menace, affirme encore le quotidien rwandais, mais comme une opportunité. Une opportunité d’écraser les milices. De ramener les réfugiés chez eux. De construire un avenir meilleur. La question est : auront-ils le courage d’essayer ? »

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