Jeanne d'Arc la gauchiste : éloge de la résistance
Au revoir la France. Bye Bye Love. Pays finito. The End. Nous sommes au XVe siècle, après 1420 et le Traité de Troyes. Affamée, épuisée, livrée au pillage, rançonnée par les bandes armées, ravagée depuis plus d’un demi-siècle par les guerres et les épidémies, la France est sur le point de crever. Bye-Bye France. Pays finito. Ou pas loin. Tout le monde ou presque s’attend à une annexion pleine et entière sous peu. Surtout à partir du moment où la ville d’Orléans est, à son tour, assiégée en octobre 1428. Avant de mourir, le roi Charles VI, lui-même ravagé, et sa femme Isabelle de Bavière ont abjuré le « soi-disant dauphin », leur propre fils, Charles VII, qui se considère quand même comme roi mais qui ne règne plus sur grand-chose. Par dérision, Anglais et Bourguignons l’appellent désormais « le roi de Bourges ». Il n’a plus un kopeck et dépend du bon-vouloir de prêteurs pour financer la défense de ses derniers territoires. C’est à partir de ce siège, au milieu de cette misère, qu’apparaît Jeanne. Une femme très jeune au milieu d’un monde d’hommes très vieux. Une justicière contre l’oppression. Une personne courageuse au milieu d’un monde de lâches. Une enfant de génie au milieu d’un monde d’adultes stupides et prétentieux. Une visionnaire généreuse au milieu d’un monde de calculateurs méprisables. Une inspirée, autant dire une illuminée. Traitée de putain et de sorcière par les Anglais, d’hérétique par l’Église alliée à l’Université et abandonnée par le roi même du royaume qu’elle a sauvé. Jugée schismatique, apostate, menteuse, devineresse, suspecte d’hérésie, errante en la foi, blasphématrice, brûlée puis récupérée ensuite pour la gloriole, béatifiée en 1909, canonisée en 1920 et désormais utilisée depuis un demi-siècle pour servir à un combat complètement étranger au sien. Ce n’est pas la première et ce ne sera pas la dernière. Mais c’est la plus célèbre. Une vraie star. Et c’est la plus bouleversante. Aimable sans conditions, sans limites, comme on peut aimer L’Iliade, Jésus, les « Cathares » ou la poésie de François Villon. Jeanne, c’est la France qu’on peut aimer. La France du mépris des conventions et de la révolte contre l’oppression. La France des visionnaires et des poètes. La France de la justice. Une France qui, comme l’autre et contre l’autre, la France de la force, continuatrice de l’Empire, n’a jamais pris fin." Auteur : Pacôme Thiellement Réalisation : Mathias Enthoven, Ameyes Aït-Oufella Montage : Ameyes Aït-Oufella Son : Baptiste Veilhan Graphisme : Morgane Sabouret, Diane Lataste Production : Hicham Tragha Directeur des programmes : Mathias Enthoven Rédaction en chef : Soumaya Benaïssa Directeur de la publication : Denis Robert Avec l’aide inestimable de l’historien Raphaël Carbonne.