« La FNSEA verrouille tous les leviers de la politique agricole française », Marianne Kerfriden sur Canal B
Marianne Kerfriden est l’autrice d’une enquête sur les cumuls de casquettes de quatre hauts dirigeants de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), parue le 23 mai 2024 chez Splann ! et plusieurs médias partenaires. Notre journaliste a présenté les conclusions de son travail chez Lucie Louâpre, dans l’émission L’Arène, sur la radio rennaise Canal B, le 7 juin 2024. Il s’agit du volet français d’un dossier européen coordonné par le consortium Lighthouse Reports. « On a travaillé avec des Belges, des Polonais, des Italiens et des Allemands, énumère Marianne Kerfriden. L’idée c’était de faire une enquête conjointe sur les syndicats agricoles, avant les élections européennes. Et de montrer que si ces syndicats revendiquent de représenter tous les agriculteurs, ce n’est pas exactement le cas. » Des infographies interactives permettent de découvrir les mandats et autres fonctions de quatre figures de la FNSEA, dont deux figures bretonnes. Ces dirigeants siègent par exemple à l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), au comité régional nitrates de Bretagne, à la direction de salons ou au conseil d’administration de groupes de presse agricole. Partout, ces leaders veillent à défendre une vision productiviste et exportatrice de l’agriculture, en témoignent la « pause » obtenue cet hiver sur le plan écophyto ou la défense des méga-bassines. « La force de la FNSEA est d’être élue démocratiquement dans les chambres d’agriculture, rappelle Marianne Kerfriden. Les postes, qu’il obtient à la fois grâce aux chambres d’agriculture et en étant syndicat majoritaire, permettent de verrouiller tous les leviers de la politique agricole française et même européenne. » En résulte une cogestion historique des questions agricoles entre le gouvernement et la FNSEA, déjà mise en lumière par notre journaliste dans un numéro de l’émission Pièces à conviction, diffusé sur France 3, en janvier 2017. « J’avais alors interviewé Dominique Bussereau, se souvient-elle. Il m’avait raconté qu’avant d’être nommé ministre, il avait reçu la visite de Jean-Michel Lemétayer, alors président de la FNSEA, et avait eu l’impression de passer un entretien d’embauche. Quand son mandat s’est terminé, Lemétayer est arrivé dans son bureau et a dit : “Dominique, est-ce que tu veux rester ministre ?” » Les organisations minoritaires (Confédération paysanne, Coordination rurale et Modef), qui ont totalisé 46 % des voix en 2019, ont du mal à faire entendre d’autres voix. En 2021, la Cour des comptes avait pris leur partie en prônant « une modification du mode de scrutin » pour favoriser le pluralisme. La FNSEA et les Jeunes agriculteurs — qui font liste commune aux élections aux chambres d’agriculture — poussent au contraire pour changer les règles de financement à leur profit. Elles réclament un changement de la clé de répartition favorisant l’organisation arrivant en tête. Toutefois, les articles qu’elles attendaient ne figurent pas dans le décret paru le 16 juillet et qui fixe les modalités d’organisation des élections du 31 janvier 2025. Le tandem FNSEA-JA a immédiatement dénoncé un « nouvel exemple du non-respect de la parole donnée ». Ministre d’un gouvernement démissionnaire chargé d’expédier les affaires courantes, Marc Fesneau cèdera-t-il à cette exigence avant de quitter la rue de Varenne ? Découvrez les organigrammes commentés des mandats d’Arnaud Rousseau, président de la FNSEA et du conseil d’administration du groupe Avril, de Thierry Coué, secrétaire général adjoint de la FNSEA, André Sergent, président de la chambre d’agriculture de Bretagne, et Jérôme Despey, premier vice-président de la FNSEA sur splann.org. 💸 Splann ! est un média à but non lucratif, qui fonctionne grâce à votre générosité. Vous pouvez nous faire un don ponctuel ou mensuel en ligne ou par chèque. 👍 Retrouvez-vous sur les réseaux sociaux. Nous sommes présents sur Mastodon, Facebook, LinkedIn, Instagram, Bluesky, Threads, X et YouTube. 📩 Abonnez-vous à notre infolettre pour recevoir une alerte lors de la publication de chacune de nos enquêtes, ainsi que des articles en avant-première chaque mois. C’est gratuit et ça le restera.