Mona Chollet (3/3)

Bookmakers

Une workaholic plus très anonyme

Cheffe d’édition au « Monde Diplomatique » de 2007 à 2022, Mona Chollet se décrit – avec euphémisme – comme « plutôt consciencieuse ». Interrogée par « Femme Actuelle », la journaliste explique : « L’aspect robotique du salariat me convenait très bien. Tout comme cette logique rassurante de l’effort récompensé : je me savais le droit de profiter de mes week-ends. » Or, quand le succès de ses livres lui permet de se libérer de cet emploi quotidien, c’est la panique à bord, sur laquelle s’ouvre son dernier essai, « Résister à la culpabilisation » (La Découverte, 2024). Ce « bulldozer » cérébral ajoute : « J’avais oublié l’autonomie. Je m’étais habituée à ce qu’on me dise tous les matins où aller, quoi faire et jusqu’à quelle heure. Organiser soi-même ses journées provoque un grand désarroi. Je me forçais à travailler huit heures par jour et le week-end, pour ne pas me laisser aller (…) Se tuer au travail, faire totalement abstraction de son bien-être, se révèle bien vu. »

Bien vu, son propos l’est aussi. Avec un premier tirage de 70 000 exemplaires, « le nouveau Mona Chollet », pour lequel elle refuse les invitations à parler en public, figure déjà parmi les dix meilleures ventes de l’automne. Son livre n’aborde pas seulement la question du sacrifice en entreprise ; parmi ce qu’elle recense comme des « empêchements d’exister », Chollet dissèque les discours misogynes, la mise en accusation des victimes de violences sexuelles, les injonctions éducatives, ou encore « le flicage des mots et des pensées » au sein des sphères militantes.
Suivie par 92 000 abonné·e·s sur X, Mona Chollet définit parfois son rapport à l’écriture comme « une drogue en soi, une porte dérobée dans l’horreur de l’époque ». Pour ce troisième et dernier épisode, ouvrons celle du petit bureau – monastique – de la Mona, qui continue de rêver d’une pièce plus grande « dont la fenêtre resterait éclairée jusqu’à une heure avancée de la nuit, pour y faire naître des livres ».
 L’autrice du mois : Mona CholletNée à Genève en 1973, « obsédée par le fait de lire, de s’informer et de changer le monde », la journaliste suisse Mona Chollet est devenue pour toute une génération de féministes un modèle d’intelligence, de sensibilité et de précision. Depuis le début des années 2000, via une dizaine d’essais érudits (« Beauté fatale », « Sorcières », « Réinventer l’amour »), elle analyse remarquablement les mécanismes de domination (masculine, capitaliste, professionnelle – ou les trois à la fois), en partageant son admiration pour la poésie de Mahmoud Darwich ou la prose engagée de Susan Sontag, pour les séries « Mad Men » ou « La Fabuleuse Madame Maisel », le tout entremêlé de confidences personnelles ou tirées de son cercle d’amies. Elle vit et travaille à Paris.

Enregistrements : septembre 2024 - Réalisation : Charlie Marcelet - Mixage : Charlie Marcelet - Illustration : Sylvain Cabot - Chant, beatmaking : Élodie Milo - Musiques originales : Samuel Hirsch - Entretien, découpage : Richard Gaitet - Prise de son : Mathilde Guermonprez - Montage : Gary Salin - Lectures : Delphine Saltel - Production : ARTE Radio

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